Taxes douanières, Trump répond aux déficits commerciaux colossaux américains et fait payer au reste de l’Europe les excédents allemands…

Les tarifs douaniers mis en place par Trump sont le reflet de l’excédent ou du déficit de la balance commerciale américaine avec les différents pays

En 2024, le déficit commercial des États-Unis a atteint le chiffre record de 1 200 milliards de dollars.

— L’excédent commercial chinois, a atteint 1 000 milliards soit l’excédent le plus important de l’histoire chinoise, et probablement du monde.

— L’excédent commercial de l’Allemagne avec les États-Unis a atteint 70 milliards d’euros en 2024 (contre 63,3 milliards en 2023).

— En 2023, le déficit commercial des États-Unis avec l’Union européenne atteignait 156,6 milliards d’euros, mais les États-Unis affichent un excédent de 108,6 milliards d’euros dans le domaine des services.

Quelles conséquences? Le secteur productif américain sera gagnant, les consommateurs subiront une hausse des prix pour la téléphonie et les produits fabriqués en Asie

L’Asie et plus particulièrement les pays ateliers seront perdants ainsi que les entreprises qui ont massivement délocalisés comme Nike

L’Europe paiera pour les excédents allemands

À première vue, l’économie américaine peut sembler peu dépendante de l’extérieur. Le taux d’ouverture commerciale (importations + exportations / PIB) des États-Unis ne s’élève en effet qu’à 25 %, contre 73 % au Mexique, 83 % en Allemagne ou 166 % au Vietnam.

L’industrie américaine est également relativement indépendante des intrants étrangers. Toutefois, si l’on se penche sur la consommation de biens des entreprises et des citoyens américains, on remarque que la désindustrialisation a entraîné la quasi-disparition ou une forte réduction de certains secteurs (textile, téléphonie, etc.).

— Si l’on considère la part de contenu local dans les biens consommés, le tableau change: les Américains dépendent de l’étranger pour environ la moitié de leur consommation de biens.

— Des droits de douane massifs pourraient donc avoir des conséquences significatives sur les prix et être difficiles à compenser par une augmentation de la production domestique.

Les États-Unis restent la première puissance économique et le moteur de la demande mondiale grâce à ses plus de 300 millions de consommateurs à haut revenu (le PIB par habitant s’élève à 82 000 dollars en 2023). L’accès à ce marché est donc stratégique pour les acteurs économiques étrangers, en particulier dans les secteurs exportateurs.

— La spécialisation productive étant marquée par le poids des services à haute valeur ajoutée (finance, Tech, etc.), les États-Unis ne sont que la seconde puissance manufacturière mondiale, avec environ 15 % de la valeur ajoutée manufacturière mondiale contre 30 % pour la Chine.

— Ce secteur manufacturier est relativement peu dépendant des importations et des intrants étrangers, puisque 20 % seulement de sa production est constituée de tels intrants. Il est à noter toutefois que l’industrie automobile est la plus fortement dépendante des intrants étrangers, illustrant ainsi son organisation régionale qui intègre le Mexique et le Canada.

— Avec ses 440 millions de consommateurs et son PIB de 18 590 milliards de dollars en 2023, la taille de l’économie européenne en fait, à l’instar de la Chine et des États-Unis, une entité économique relativement indépendante. Mais les États-Unis restent un fournisseur important de sécurité, notamment via l’OTAN, en fournissant des produits énergétiques, notamment du gaz naturel liquéfié (GNL), et en réalisant des investissements. Le marché européen, auquel les entreprises américaines accèdent via les exportations de biens et de services, mais également au travers des activités de leurs filiales établies en Europe, reste clef.

— Preuve en est l’attention accordée aux réglementations européennes par les géants du numérique européen, dont les arguments sont aujourd’hui repris avec véhémence par l’administration Trump. En accusant l’Union de vouloir instaurer «une loi mondiale de la censure» avec le Digital Services Act, par exemple, elle reconnaît implicitement son pouvoir.

— L’Europe représente en effet 24 % du chiffre d’affaires de Meta, 26 % de celui d’Apple et 29 % de celui de Google (cette dernière ne ventilant pas le calcul au sein de la région Europe, Moyen-Orient et Afrique, EMEA).

— La Chine, deuxième économie mondiale et première puissance manufacturière, bénéficie de plusieurs atouts dans ses relations économiques avec les États-Unis. Son poids dans la production et les échanges de biens rend aujourd’hui illusoire une véritable déconnexion avec cette économie qui s’est rendue omniprésente, à la fois pour la fourniture de certains biens de consommation (téléphones portables, jouets, etc.) et d’intrants pour les industries étrangères (acier, terres rares, mais aussi composants en plastique, etc.).

— Les États-Unis ont pour eux la taille de leur marché intérieur et la capacité de leurs entreprises, notamment les géants de la technologie et les banques, à organiser les flux, à créer les infrastructures de l’économie mondiale et à mettre en place des points de contrôle sur lesquels s’exerce le pouvoir de l’État fédéral, comme le démontrent les travaux d’Abe Newman et Henry Farrell (le cloud et FISA, le système SWIFT, les logiciels EDA et les fabricants de machines Applied Material et KLA ainsi que les contrôles des exportations de GPU).

Les mesures douanières et les autres dispositions prises pour réduire la dépendance américaine envers la Chine (Chips Act, mesures de contrôle des exportations, obligations en matière de contenu d’intrants américains dans la loi sur la réduction de l’inflation, etc.) ont entraîné une baisse des échanges entre les États-Unis et la Chine.

— Toutefois, les importations et le déficit commercial américain ont continué à croître, et le Mexique et, surtout, le Vietnam ont gagné des parts de marché.

À première vue, on assiste donc à un découplage réel entre la Chine et les États-Unis. Toutefois, le Mexique et le Vietnam sont encore spécialisés dans l’assemblage, une activité à faible valeur ajoutée qui requiert de nombreux intrants importés.

Plusieurs études estiment donc que ces pays jouent le rôle de « connecteurs » entre la Chine et les États-Unis. Preuve qu’il est difficile de se séparer de « la seule superpuissance manufacturière » — la Chine.

Le président américain, Donald Trump, a annoncé des tarifs douaniers d’un « minimum » de 10 % sur toutes les importations, qui entreront en vigueur le 5 avril. Des barrières tarifaires plus élevées seront aussi appliquées à une soixantaine de pays le 9 avril, dans cette nouvelle rafale de tarifs punitifs. Le pourcentage de base de 10 % s’additionne à la surtaxe pour tous ceux visés directement par les tarifs « réciproques ».

Chine 34 %, Union européenne 20 %, Vietnam 46 %, Taïwan 32 %, Royaume-Uni 10 %, Afrique du Sud 30 %, Israël 17 %, Chili 10 %. Difficile de s’y retrouver dans ces pourcentages différents d’un pays à l’autre. C’est la Maison-Blanche qui a fait les calculs de ces tarifs douaniers réciproques, en prenant en compte, dit-elle, les barrières tarifaires imposées aux produits américains et les « autres formes de tricherie ». Le président a aussi mentionné les barrières « non financières », citant en exemples la manipulation des devises, les subventions et le vol de la propriété intellectuelle

Lesotho : 50 %
Cambodge : 49 %
Vietnam : 46 %
Sri Lanka : 44 %
Bangladesh : 37 %
Thaïlande : 36 %
Chine : 34 %
Taïwan : 32 %
Indonésie : 32 %
Suisse : 31 %
Afrique du Sud : 30 %
Pakistan : 29 %
Inde : 26 %
Corée du Sud : 25 %
Côte d’Ivoire : 21 %
Japon : 24 %
Malaisie : 24 %
Union européenne : 20 %
Israël : 17 %
Philippines : 17 %
Royaume-Uni : 10 %
Brésil : 10 %
Singapour : 10 %
Chili : 10 %
Australie : 10 %
Turquie : 10 %
Colombie : 10 %

Une fiche d’information indique que le Canada et le Mexique sont exemptés de ces nouveaux droits de douane. Les droits supplémentaires de 25 % sur toutes les automobiles et les pièces importées aux États-Unis doivent aussi entrer en vigueur à minuit dans la nuit de mercredi à jeudi. I

Philippe Murer 🇫🇷
@PhilippeMurer
·

✅Si l’Europe ne se protège pas avec des droits de douane de la Chine, les biens Chinois vont se déverser en Europe à une vitesse folle ! URGENCE.
Effondrement économique de l’Europe si elle ne taxe pas les biens chinois. En plus, les biens européens exportés aux 🇺🇸 seront taxés. Seule, la demande intérieure soutiendra la croissance.
✅Avec des pays européens en décroissance démographique hormis la France et le Royaume-Uni, avec des dirigeants qui ont comme idéologie d’écraser les salaires donc la demande intérieure, ça va être très difficile pour les Européens.

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About pgibertie

Agrégé d'histoire, Professeur de Chaire Supérieure en économie et en géopolitique, intervenant àBordeaux III et comme formateur à l'agrégation d'économie à Rennes Aujourd'hui retraité
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5 Responses to Taxes douanières, Trump répond aux déficits commerciaux colossaux américains et fait payer au reste de l’Europe les excédents allemands…

  1. Avatar de Pierre Driout Pierre Driout dit :

    Oui cela fait tout drôle de se retrouver sexagénaire dans un pays en voie de développement alors qu’enfant on se croyait dans un pays en tête des classements mondiaux !

    Le déclassement moral pour quelqu’un de ma génération – né au début des années soixante – est prodigieux !

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    • Avatar de Jean-louis Roba Jean-louis Roba dit :

      Bien vrai. Mais ce n’est pas une fatalité…

      Il y a 30 ans, un ami qui fut ouvrier avant-guerre m’avait expliqué : « De nos jours, les ouvriers offrent des bijoux en or à leur épouse. Cela ne peut pas durer’.

      Il avait tout dit. On a trop bien vécu… Et largement au-dessus de nos moyens au vu de l’importance de la dette.

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      • Avatar de lepiaf18 lepiaf18 dit :

        Sauf que « la dette« , celle dont vous parlez, ce ne sont pas en général les « ouvriers », pas plus que les bijoux de leurs épouses, qui désormais sont aussi ouvrières (un salaire ne suffit plus pour nourrir une famille !), qui l’ont créée la plupart du temps!

        Jetez plutôt un œil du côté des transferts de fric Public-privé et des actionnaires, tous copains comme cochons dans les Conseils d’Administration.
        Vous savez le jeu du à toi-à moi puis à moi-à toi.

        Voulez-vous des noms, j’en ai plein, particulièrement ces 10 dernières années ? Des gens qui se gavent ou se sont gavés d’argent public, justement. Sans même parler du cas Cahuzac ! Ne pas oublier que c’est l’argent de nos impôts, en fait, et que la « Sécu » a bon dos dans la manip.
        Avec 10 à 20 milliards de déficit annuel, celui d’aujourd’hui, justement, la dette nous permettrait de « vivre » de la même façon pendant 66 à 133 ans (1300/10 ou 20)…

        Mais alors, elle vient d’où la dette ?
        En bref, la dette, c’est en réalité eux (ces actinonaires politico-financiers quasiment tous sortis de l’ENA de Sciences-Po ou de l’ESSEC qui se la sont mise dans les poches, sans nous demander notre avis, bien sûr. Chez moi ça s’appelle escroquerie en bande organisée !

        Et l’épisode suivant est déjà sur les rails, c’est la « monnaie » numérique. Pas les Cryptos, non, non, juste « l’Euro numérique » pour nous. Je vous laisse imaginer la suite.

        Le seul tort des ouvriers c’est d’avoir cru aux doux mots de la gauche ploutocrate française qui s’est parfaitement adapté à l’économie de « Marché » (quoiqu’elle se fasse plomber de temps en temps !) et à une forme de « mondialisation » à sens unique et à son seul profit, entre autres.
        Pour rappel, la clique à Macron comme celle de Hollande (on y retrouve d’ailleurs les mêmes clampins sans que ça fasse jaser plus que ça !) est issue des « roses » du Parti Socialiste, descendance particulièrement dégénérée du Mitterrandisme.

        Finalement, la « finance de gauche » est encore plus détestable que celle « de droite » !

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  2. Avatar de jeanmariesarot jeanmariesarot dit :

    TRUMP n’est pas un fou car sa stratégie d’augmenter les droits de douane a été mise au point par de grands économistes qui l’entourent. La dépréciation des monnaies étrangères va permettre de compenser leur hausse et n’entraînera pas d’inflation, contrairement à tous les prévisions pessimistes de nos journalistes anti trump. Par contre, le Trésor Américain va enregistrer des recettes supplémentaires qui vont aller dans la réindustrialisation, sans devoir recourir à des impôts supplémentaires.

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  3. Avatar de jeanmariesarot jeanmariesarot dit :

    TRUMP n’est pas un fou car sa stratégie d’augmenter les droits de douane a été mise au point par de grands économistes qui l’entourent. La dépréciation des monnaies étrangères va permettre de compenser leur hausse et n’entraînera pas d’inflation, contrairement à tous les prévisions pessimistes de nos journalistes anti trump. Par contre, le Trésor Américain va enregistrer des recettes supplémentaires qui vont aller dans la réindustrialisation, sans devoir recourir à des impôts supplémentaires.

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